Passif en climat chaud : la construction de l’ambassade de Belgique et des Pays-Bas à Kinshasa
En 2013, l’Etat belge (SPF Affaires étrangères) a lancé un appel à projet en design & build pour la construction de l’ambassade de Belgique et des Pays-Bas à Kinshasa. Notre bureau d’architecture A2M a remporté ce concours, en collaboration avec l’entreprise de construction Willemen Group. A2M s’est donné pour objectif professionnel de rendre le monde plus habitable en défendant une architecture contemporaine de qualité à haute valeur environnementale. Dans cette optique, le standard passif est apparu comme l’outil de conception le plus pertinent et il est actuellement utilisé pour tous les projets de l’agence.
Face à ce concours dans un climat totalement différent de celui de la Belgique, nous avons voulu relever le défi en proposant aussi une approche passive et durable. Bâtiment public, image officielle de la Belgique auprès d’une capitale étrangère et accueillant un programme hétérogène impliquant l’accueil du public et des fonctions devant être protégées, l’ambassade est un bâtiment complexe offrant une surface de 5769 m². Celui-ci sera le premier bâtiment passif d’Afrique !
Au-delà du passif, la conception du projet s’est appuyée sur l’ensemble des cibles de la certification BREEAM[i]. Bien qu’aucun certificat ne soit demandé, nous avons visé le niveau Excellent. En parallèle des aspects énergétiques, une attention particulière a donc été portées à d’autres paramètres tels que la gestion de l’eau, la biodiversité, le confort et l’éclairage naturel, l’impact des matériaux sur l’environnement et la santé, etc.
Climat tropical et stratégies passives
Le standard passif a fait ses preuves et s’est largement répandu en Europe centrale. Bien que la majorité se trouve dans des climats froids ou tempérés, différents cas commencent à voir le jour dans d’autres climats. Le Passive House Institute a d’ailleurs sorti différentes études[i] « Passive Houses for different climate zones », “Passive Houses in tropical climates,” et “Passive Houses in South-West Europe” démontrant que les principes du passif restaient valables et pouvaient être appliqués à un niveau international dans différents endroits tel que la ville de Kinshasa ou le climat est tropical sec et humide.
Suivant le type de climat, différentes stratégies vont être utilisées et combinées. L’enveloppe doit être optimisée afin de profiter des éléments favorables du climat et se protéger de ceux qui sont défavorables. La conception du bâtiment, et de l’enveloppe en particulier, doit assurer une bonne gestion des flux thermiques. La forme, les ouvertures, les protections solaires et les matériaux doivent être adaptés en fonction des fluctuations journalières et saisonnières des apports calorifiques extérieurs et intérieurs.
En climat chaud, le point d’attention principal consiste à limiter les surchauffes de manière à diminuer le besoin de refroidissement. A cette fin, plusieurs stratégies ont été combinées :
Optimisation de l’isolation
Optimisation de l’étanchéité à l’air
Maîtrise et gestion des gains solaires
Contrôle du rayonnement et optimisation de l’inertie
Optimisation de la ventilation
Maîtrise et gestion des gains internes Image 1: Optimisation d’isolation – photo chantier, pose de l’isolation des murs
Image 2: Vues d’ensoleillement à la date du 21 mars à 8h, 10h, 12h, 14h, 16h et 18hImage 3: Maîtrise et gestion des gains internes – Simulations d’éclairage naturel pour un bureau type avec DAYSIM
Différentes options ont été testées à l’aide du logiciel de simulation dynamique IES VE (Integrated Environmental Solutions, Virtual Environment)[i], en tenant compte des conditions climatiques extérieures (pour une année type de référence Test Reference Year (TRY) à Kinshasa) et des données physiques du bâtiment (surfaces, compositions des parois, etc.). Des charges internes sont prises en compte suivant le programme demandé, en tenant compte des équipements et de l’occupation.
Le climat est très exigeant. On constate que pendant les heures d’occupation (5 jours sur 7 de 7 à 19h, soit un total de 3120 heures par an), la température excède les 25° pendant 82% du temps et l’humidité relative dépasse les 50% pendant 97% du temps. Par ailleurs, la température et l’humidité relative restent relativement élevées la nuit également, rendant impossibles les stratégies de rafraichissement nocturne. Afin de garantir un niveau de confort optimal, l’objectif fixé est de maintenir l’ambiance intérieure à 25°C et 55% d’humidité relative au moins 95% du temps d’occupation.
[i] Marc Coppen du bureau d’études Crea-Tec a réalisé les simulations dynamiques du bâtiment et a déterminé les stratégies les plus intéressantes en termes de réduction du besoin de froid.